J'espère que ce titre vous fait bondir autant que moi.
Il y a quelques années, une personne devenue aujourd'hui une figure reconnue dans le domaine avait écrit un article sur le fait que "être autiste est à la mode", évoquant un prétendu surdiagnostic de l’autisme. Ce discours, venant d’une personne elle-même diagnostiquée à l’âge adulte, m’avait profondément mise en colère.
Et pour couronner le tout, un imbécile à écrit un commentaire sur notre page Facebook "C'est la nouvelle mode" en parlant des troubles neurodéveloppementaux.
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Je ne crois pas au surdiagnostic. Vivre avec un handicap tel que l’autisme n’a rien de fantasmagorique ! C’est une réalité complexe, souvent invisible, mais bien réelle. Et je ne vois pas en quoi un professionnel y gagnerai à diagnostiquer un tel handicap chez une personne étant donné qu'il ne s'agit pas d'une maladie et que par conséquent, on ne peut pas en guérir.
Le diagnostic de l’autisme repose sur des critères rigoureux définis par des manuels comme le DSM-5, et les professionnels de santé suivent un processus d’évaluation complet pour éviter tout malentendu ou confusion.
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Peut-être pensez-vous que je radote, mais je radoterai jusqu'à ce que cette croyance ait disparu... (oui j'ai la foie 😉). Parce que changer les mentalités prend du temps, et je suis prête à répéter, expliquer et déconstruire les idées reçues autant que nécessaire.
Et donc, encore une fois cela m’a donc poussée à réfléchir :
Comment se fait-il qu’il y ait autant de personnes autistes aujourd’hui ? Si l’autisme résulte de l’interaction complexe de nombreux facteurs, ne devrions-nous pas nous attendre à ce qu’il soit rare ? Pourtant, les diagnostics augmentent nettement.
Explorons les raisons qui expliquent cette situation.
1. Une meilleure reconnaissance de l’autisme
L’un des facteurs principaux est la manière dont nous identifions et comprenons ce trouble. Les progrès en matière de diagnostic ont permis de mieux détecter l’autisme, mais également de reconnaître la diversité des profils sur le spectre.
L’élargissement du spectre
Dans les années 1980, le terme "autisme" était souvent réservé à des formes sévères, avec des troubles cognitifs ou comportementaux visibles. Aujourd’hui, le concept de trouble du spectre autistique (TSA) englobe des profils variés, y compris des formes plus légères (parfois appelées "autisme de haut niveau").
Les critères diagnostiques (comme ceux du DSM-5) sont plus inclusifs.
De nombreux adultes diagnostiqués tardivement étaient auparavant passés inaperçus.
Les professionnels de santé disposent d’outils plus performants pour détecter les signes, même chez des populations longtemps sous-diagnostiquées, comme les femmes.
Cela ne signifie pas que l’autisme est en augmentation : il est simplement mieux reconnu.
Il y a encore du chemin à parcourir, mais les perceptions évoluent. L’autisme est mieux compris, et les familles ou les individus n’hésitent plus à chercher un diagnostic. Ce qui, autrefois, passait pour de la "timidité" ou des "bizarreries" est aujourd’hui interprété différemment, dans un cadre neurodéveloppemental.
2. Une base génétique complexe
L’autisme est fortement influencé par la génétique, avec une héritabilité estimée entre 50 % et 90 %, selon les études. Mais ces gènes ne s’expriment pas toujours de la même manière.
Mutations génétiques et transmission
Certaines mutations communes, comme celles des gènes SHANK3 ou CHD8, augmentent le risque d’autisme mais nécessitent souvent d’autres facteurs (environnementaux ou épigénétiques) pour s’exprimer.
Des mutations de novo (non présentes chez les parents) peuvent aussi expliquer des cas isolés d’autisme.
L’âge avancé des parents, en particulier celui du père, est corrélé à un risque accru. Cela s’explique par une accumulation de mutations spontanées dans les cellules germinales.
L’autisme n’est pas causé par un seul gène, mais par une interaction complexe de nombreux gènes. Beaucoup d’entre eux sont présents chez des individus neurotypiques, mais certaines combinaisons peuvent conduire à des manifestations autistiques.
3. Facteurs environnementaux modernes
En plus de la génétique, l’environnement joue un rôle dans l’apparition ou l’intensité des traits autistiques. Les conditions prénatales et les influences postnatales sont particulièrement importantes.
Expositions prénatales
Infections maternelles.
Exposition à des toxines, pesticides ou perturbateurs endocriniens (comme le bisphénol A).
Médicaments comme l’acide valproïque.
Carences nutritionnelles (acide folique, oméga-3, fer).
Le stress maternel influence aussi l’expression des gènes via des modifications épigénétiques, altérant le développement du cerveau. Mais aussi les changements dans le microbiome, causés par les modes de vie modernes (alimentation, césariennes, antibiotiques), peuvent affecter l’axe intestin-cerveau et jouer un rôle dans les troubles neurodéveloppementaux.
4. Pourquoi autant de personnes autistes aujourd’hui ?
Bien que l’autisme repose sur des interactions complexes, les facteurs combinés peuvent expliquer pourquoi il semble si fréquent.
Les gènes associés à l’autisme sont courants. Beaucoup d’entre eux n’entraînent pas nécessairement des traits autistiques, mais augmentent la susceptibilité lorsqu’ils interagissent avec d’autres facteurs.
L’environnement moderne multiplie les perturbations potentielles. Ces influences s’ajoutent aux prédispositions génétiques.
Les autistes ont toujours été là. La société d’aujourd’hui est simplement mieux outillée pour les reconnaître.
En France, la prévalence des troubles du spectre de l'autisme (TSA) est estimée entre 0,9 % et 1,2 % de la population, ce qui correspond à environ une personne sur 100. (Handicap.gouv.fr)
Cela représente environ 700 000 personnes concernées par l’autisme en France, dont 100 000 ont moins de 20 ans. (Autisme Info Service)
Cependant, ces chiffres peuvent varier en fonction des études et des méthodes de collecte de données. Par exemple, des recherches menées dans certains départements ont montré une prévalence de 8 à 10 pour 1000 chez les enfants de 8 ans nés en 2010.
Non, l’autisme n’est pas "à la mode". Il s’agit d’une condition complexe, ancrée dans des bases biologiques et environnementales. Si davantage de personnes reçoivent un diagnostic, ce n’est pas parce qu’elles veulent être "à la mode", mais parce que nous sommes enfin capables de les voir.
Loin de stigmatiser cette reconnaissance, nous devrions nous en réjouir. Cela reflète une société plus inclusive, prête à reconnaître et à accueillir la diversité neurodéveloppementale comme une richesse, et non comme une différence à cacher. Le fait d'en parler plus n'en fait pas une 'mode', mais une avancée nécessaire pour reconnaître, comprendre et soutenir des milliers de personnes qui, auparavant, restaient invisibles ou incomprises.
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